Découvrez l’interview de notre expert, Kary Bheemaiah directeur de recherche, sur le sujet du change management.
Quel est le contexte du change management aujourd’hui ?
Kary B :
Les entreprises comprennent le besoin de management du changement qui est essentiel, sans lequel elles ne sauraient s’adapter aux transformations environnantes.
Le concept n’est pas nouveau, on le connaît bien depuis des années. On en maîtrise les grands principes et les entreprises en ont connu de multiples mises en œuvre.
L’un de nos clients a même des équipes dédiées à ce sujet, habituées à travailler selon la méthode agile.
Nous constatons que, dans de nombreuses entreprises, les collaborateurs ont vu passer plusieurs plans de changement dont les effets ne sont pas lisibles. Le résultat est que ces derniers ne croient plus que cela puisse fonctionner. On observe une réelle lassitude autour de ce sujet pourtant majeur dans la transformation de l’entreprise.
Le constat aujourd’hui est que 70 % des programmes de changement sont des échecs !
Comment peut-on l‘expliquer ?
Kary B :
Le problème réside dans le fait que les dirigeants pensent connaître la solution à apporter mais, dans le même temps, ne sont pas capables de déterminer ou d’expliquer où se situe la base du problème !
Ils créent ainsi un faux effet solution qui n’est pas adapté à leur environnement.
Nous analysons le problème ainsi :
La méthode d’identification des problématiques de transformation en entreprise exige un investissement en temps important pour tous les collaborateurs, alors que, une fois encore, les résultats ne sont que peu ou pas observables. Dans la durée, le personnel n’y croit plus.
Ces phases amont passent en général par des questionnaires trop longs et complexes. Les éléments de mesure (metrics) sont standardisés, par exemple des questions identiques dans tous les départements. Or chaque environnement est différent. L’une des principales erreurs est donc de ne pas tenir compte en amont de l’utilisateur final : le collaborateur qui, au quotidien, est le plus à même d’identifier les problèmes dans son service.
Quelle méthode d’analyse proposez-vous ?
Kary B :
Avec mon équipe de recherche nous avons analysé d’une part le rôle de la culture de l’entreprise dans l’acceptation du changement.
Et d’autre part nous avons étudié le cerveau et nous nous sommes basés sur les recherches en neurosciences cognitives sociales afin de comprendre le comportement des employés et de pouvoir relever ces défis !
Le résultat de ce mode de pensée a conduit U à construire un outil de mesure visuel, une méthodologie en triangle.
Il s’agit de replacer l’individu au centre de l’étude, de lui redonner du pouvoir et de lui permettre d’évaluer plus facilement et librement la situation.
Fini les questionnaires binaires, qui biaisent les résultats. Nous proposons à chaque personne de répondre aux questions en plaçant son niveau de sensibilité au sein d’une pyramide. On relève ainsi des résultats beaucoup plus précis.
Il s’agit, pour la personne interrogée, d’exprimer son point de vue en déplaçant le curseur en fonction de la question posée.
L’économiste John Kay parle d’ « obliquity », ou « approche oblique » qui s’avère plus efficace pour traiter un sujet complexe.
Avant de résoudre un problème dans sa globalité il faut commencer par s’attaquer aux plus petits qui l’entourent afin de cerner les interactions qui peuvent exister entre eux.
Le secret est donc d’attaquer le problème par petits morceaux, le visualiser à la base de la hiérarchie afin d’apporter des solutions concrètes et agir par étapes. Des solutions peuvent se trouver par petits bouts pour arriver à résoudre le grand challenge !
C’est donc de cette façon que nous abordons le sujet avec nos clients.
Quels résultats en avez-vous obtenus ?
Kary B :
Beaucoup de résultats restent bien sûr confidentiels. Mais sans trahir de secrets, je dois dire que certains de nos résultats ont été frappants.
Dans cet exemple anonymisé issu d’un cas réel, après analyse, nous voyons très clairement un dysfonctionnement dans la perception de la communication de l’entreprise, selon la fonction occupée.
Cette méthode a permis de mettre en exergue un constat clair suite à la question « comment se déroule la communication au sein de votre département ? » :
Plus de 30% de non-managers ressentent une mauvaise communication contre 25% des managers et dirigeants qui estiment que la communication est claire et régulière.
Pour nos interlocuteurs, le choc a été rude lors de notre restitution. Mais le plus compliqué dans cet exemple, a été lié au fait que certains managers ne souhaitaient pas partager ces résultats, sans doute trop dérangeants.
On voit lors de nos interventions que le plus dur aujourd’hui est de faire changer les mentalités et, plus encore, la culture d’une entreprise !
La société qui s’engage dans un process de changement doit savoir s’ouvrir et accepter de regarder les problèmes en face, en oubliant le filtre d’une communication bien rodée qui ne laisse place qu’aux histoires maîtrisées. C’est la seule méthode envisageable pour espérer apporter des solutions.
On comprend que le frein est aussi une question de culture d’entreprise, mais ce sujet méritera un article à part entière dans une prochaine NewsLetter, restez connectés !